Quand l’expérience humanitaire inspire l’autonomie professionnelle…
Soutenues et préparées par l’organisme Infirmiers et infirmières sans frontières nous avons accompagné en janvier dernier 7 étudiants de notre collège, le cégep de St-Félicien, dans un stage humanitaire au Sénégal. Situé dans la brousse, le poste de santé de Thiaré est une petite clinique forte rudimentaire. Un infirmier y coordonne les activités et travaille avec une sage-femme, 3 matrones (accoucheuses traditionnelles), un jeune assistant infirmier et quelques personnes formées sur place pour accomplir différentes tâches (inscription, pansements, injections, vaccination).
À notre arrivée, une petite visite à pied dans le village informe rapidement la population de notre présence et signifie l’arrivée de médicaments, de fournitures et de personnel supplémentaires au centre de santé. Cette visite nous sensibilise également aux conditions sanitaires de la population.
Faute de médecin, nos étudiants et nous sommes préparés à intégrer un rôle infirmier «élargi». Outillés des documents et procédures publiés par l’organisation Médecins sans frontières, nous sommes très conscients et même anxieux à l’égard du grand niveau de responsabilité que nous devons assumer. À l’évaluation qui est pour nous une tâche familière sont ajoutés les rôles suivants : identifier des hypothèses de diagnostics médicaux, effectuer les TDR disponibles (tests de dépistage rapides) et prescrire les traitements requis. Une fois ces étapes complétées, nous devons conjuguer avec la médication disponible et valider nos orientations auprès de l’infirmier présent. L’adaptation de notre groupe à cette nouvelle réalité professionnelle est graduelle et surtout soutenue par la supervision de l’infirmier local.
En contrepartie de cette belle autonomie professionnelle, l’impuissance ressentie devant les limites matérielles de la clinique, les limites financières des personnes nécessitantes et certaines réalités culturelles sont beaucoup plus difficiles. Quel contraste notre facilité d’accès aux soins, l’abondance de nos pharmacies et leur réalité. La condition des installations et du matériel disponible est déconcertante. Nos pratiques et valeurs sont plus d’une fois ébranlées.
Heureusement pour nous, il a été possible de traiter la grande majorité des situations cliniques rencontrées (infections respiratoires, diarrhées-vomissements, déshydratations, paludisme, parasites intestinaux et plaies superficielles). À tour de rôle, les étudiants ont eu la chance de participer aux activités de vaccination, aux cliniques de la sage-femme et à des accouchements. La proximité de l’école primaire a permis au groupe de réaliser des activités d’enseignement.
Cette expérience humanitaire s’est avéré un excellent tremplin éducatif et professionnel. Elle a encré l’importance d’une solide formation, évaluation et jugement clinique et le support indispensable d’outils de référence appropriés. Elle nous a également permis une réflexion concernant le potentiel de la profession infirmière. L’autonomie professionnelle, la valorisation des rôles infirmiers, le droit de prescrire semblent un peu plus concrets, plus accessibles. Entendre nos étudiants exprimer leur intérêt à poursuivre leur formation au niveau universitaire et pour revivre ce type de voyage nous confirme le succès de cette grande aventure. Enfin nous nous estimons très choyées d’avoir réalisé ce stage humanitaire et recommandons cette aventure à tous.
« Humanitairement » vôtre, Josée Ouellet et Guylaine Harvey
Enseignantes au département de Soins infirmiers du cégep de St-Félicien